Les carillons de clocher, les pendules de table, les montres de poche… depuis des siècles, l’homme fait sonner le temps.
Mais pour qu’une sonnerie se fasse entendre au poignet, c’est une autre paire de manches…
Au début des années 1940, l’horlogerie Vulcain, créée en 1858 à La Chaux-de-Fonds (Suisse), rêve de fabriquer une montre à la fois étanche, solide et élégante, et surtout dans laquelle serait intégré un réveil bien audible. Plusieurs constructeurs ont déjà échoué à relever ce défi.
Le physicien français Paul Langevin est un ami de la famille Ditisheim, fondatrice de Vulcain. Il s’intéresse alors au problème de l’amplification acoustique et trouve la solution (et le nom) en étudiant les criquets, capables de se faire entendre à plusieurs dizaines de mètres. Il renforce le marteau vibrant par à une membrane élastique. Le boîtier, dont le fond est percé devient ainsi une caisse de résonnance.
En 1947, Vulcain commercialise la Cricket, première montre-bracelet avec réveil intégré : sa sonnerie est aussi stridente que le bruit d’un criquet.
Dès sa sortie, la Cricket connait un immense succès dans le monde entier, notamment aux USA. Les hommes d’affaires ne peuvent plus s’en passer.
Ils s’en servent pour être à l’heure aux rendez-vous, ne plus rater plus leurs trains… et même se réveiller après la sieste.
La Cricket est tellement à la mode, que de nombreux présidents des Etats-Unis portent au poignet cette montre « Made in Switzerland ».
Il est vrai que Vulcain a pris l’habitude d’offrir un modèle à chaque président américain.
Harry Truman, Dwight Eisenhower, Richard Nixon et Lyndon Johnson donneront à la Cricket son surnom de « Montre des Présidents ».
Ce dernier personnalisera la sienne en intégrant sa signature sur le cadran et n’hésitera pas à la porter en couverture de Newsweek en 1964.
Ironie de l’histoire, c’est avec sa Cricket au poignet que Dwight Eisenhower signera en 1954 les accords protectionnistes limitant les importations de montres suisses aux Etats-Unis.
Pour entretenir la légende, Michel Ditisheim, dernier patron de Vulcain offre une Cricket au dernier dirigeant de l’URSS, Mikhaïl Gorbatchev, en 1987.
Nul doute que l’initiateur de la perestroïka a apprécié ce cadeau : il porte la montre en couverture du Time daté du 31 décembre 1990, un an à peine avant la fin de l’URSS.
De 1947 à nos jours, le mouvement mécanique de la Vulcain Cricket a été fabriqué à plus de 100 000 exemplaires identiques.